Dance Party in Iraq

Stéphane Degoutin et Gwenola Wagon

Installation vidéo

2012

Dance Party In Iraq témoigne d’une étrange mode. Pour tromper leur ennui durant l’occupation qui s’éternise en Irak et en Afghanistan, des militaires se filment en train de danser et postent massivement leurs vidéos en ligne. L’installation Dance Party In Iraq procède de la collecte systématique de ces vidéos, présentées sous la forme d’un triptyque. Le montage condense les aspects ambivalents de ce phénomène : violence, défoulement, fraternisation, érotisme, mort, conjuration, nostalgie, fuite, pop culture… Il présente une vision dérangeante du conflit et de sa médiatisation.

Exposition "Sortie de mon corps", Espace Khiasma, Les Lilas, 2013
Image extraite de l'installation vidéo
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Nous recueillons régulièrement toutes les vidéos que nous pouvons trouver montrant des militaires qui dansent sur le champ de bataille, en Irak ou en Afghanistan. Au début, elles étaient assez rares, puis la mode a pris. Une vidéo en particulier, Dance Party in Iraq, a connu un grand succès, qui a inspiré d’autres réalisateurs amateurs. Ce sont des Marines américains pour la plupart, parfois des Anglais. Ils publient leurs vidéos sur Facebook, ou directement sur YouTube. En général, elles ont été recopiées plusieurs fois d’un serveur à un autre avant d’émerger publiquement.



Ce ne sont pas les images de la guerre auxquelles nous sommes habitués, celles des reportages ou des films de fiction, ni celles de la guerre héroïque, ni de la violence mécanique chantée par Marinetti, ni Guernica – on est plus proche de Mash ou de certaines scènes d'Apocalypse Now. Les titres des films témoignent principalement de l’ennui : Bored in Afghanistan, Bored Marines, Bored Bored Marines, Bored as hell, Lonely Nights In Afghanistan, etc. Ce sont des jours à attendre. C’est ce vide temporel et ces lieux désertiques que les soldats cherchent à occuper, en bougeant, remplissant l’espace par des danses frénétiques.



On peut imaginer la nostalgie de la culture populaire chez ces jeunes danseurs, déconnectés du territoire dans lequel ils se retrouvent projetés, déconnectés de l'histoire et de la culture où ils se trouvent, coincés dans des guerres immobiles, d'usure, dont les images officielles effacent toute trace de sang, de violence. 
Ces vidéos montrent avant tout une disjonction totale des soldats avec la situation dans laquelle ils sont ou avec ce que nous imaginons de leur situation. Le soldat séparé de son pays pendant longtemps cherche à retrouver dans la musique une extension de chez lui. Rejouer un tube populaire pour se croire « at home » tout en étant ailleurs, danser sur sa propre culture pour se rassurer. La pop music comme une maison.



Certaines scènes sont à la limite de l’obscène et même impossibles, irréelles : hors du territoire de la raison. Ce qui semble fou est d’une part l’acte de danser devant des explosions mais aussi de filmer et de transmettre ces actes. La guerre dans ces territoires semble basculer aux bords de la folie.
 Images ambiguës, elles montrent aussi des sentiments que l’on n’associe habituellement pas à la guerre : joie, fraternité avec l’ennemi. Elles montrent des êtres humains. Danser est aussi une manière de communiquer : les Américains dansent avec les paysans afghans ou avec les policiers irakiens, par exemple dans American Soldier dancing with Iraqi troops funny. Ils se livrent à des sortes de battles, similaires à celles que l’on pourrait voir dans les rues des grandes métropoles, à la différence près qu’ils dansent avec des mitraillettes chargées. On se demande si finalement l’armée américaine ne serait pas plus apte à transmettre sa culture pop qu’à sécuriser des territoires.



Diffusion

Exposition We also Dance, Krakow Museum of Photography, Krakow Photomonth Festival, 19 mai – 18 juin 2017

Exposition Dégât des eaux chez Shift / Paris, february 12, 19 and 26th 2015

Exposition Sortie de mon corps, SAVVY Contemporary, Richardstr. 20, Berlin, 8 mars - 12 avril 2014

Exposition Le corps manquant, Institut français d'Alger, 7, rue Hassani Issad, Alger, 5 - 26 juin 2014

Exposition Sortie de mon corps, Espace Khiasma, 15 rue Chassagnolle, Les Lilas, 11 octobre au 12 décembre 2013

Exposition Galerie, Vitrine, L'Unique, Caen, 23 janvier - 18 mars 2013.

Exposition Résurgences, performances et arts éphémères. Plateforme. Paris, juin 2012

Exposition Dance Party in Iraq, vitrine de la Maison du Peuple, rue Klock, Clichy-la-Garenne, 14 décembre 2012 au 10 février 2013

Annexes

Générique

Production : Mairie de Clichy

Commissaire : Guillaume Lasserre