Mute

Stéphane Degoutin et Gwenola Wagon

30 min, HD, couleur, muet

2011

Film de danse en réseau

Mute est saturé de traces de danses sauvages du monde entier mises en réseau. Elles se donnent la réplique, formant un chorus généralisé: rituels festifs entre amis, free parties, fêtes traditionnelles, danses improvisées dans une chambre d'adolescent, vidéo clips, rituels kecak d'Indonésie, transe quibayo, danse perse, pasteurs pentecôtistes qui font s'évanouir les foules, danses d'Emiratis dans les luxueux centres commerciaux et les parkings de Dubaï, militaires américains s'entraînant dans d'acrobatiques chorégraphies en Irak et en Afghanistan, groupes d'adolescents expliquant le pogo, lycéens dansant le jump style (danse très rythmée où l'on saute en levant les jambes), groupes de mosh pit, expériences de crowd surfing (surfer dans la foule), de stage diving (se jeter dans le vide de la scène), amateurs de head banging (bouger la tête en faisant des cercles), foules se précipitant les unes sur les autres dans le wall of death (mur de la mort), ou tournant dans un circle pit, corps dans le brouillard (fog machine), etc.

DISCOTHÈQUE SAUVAGE

Le principe d’une discothèque est de mettre en phase les corps, en les plongeant tous dans la même musique, dans le même espace, dans le même temps. La discothèque mécanise les corps dansants. Elle enferme le rituel festif dans une boîte, elle enferme la nuit dans une «boîte de nuit». La discothèque est à la fête ce que la prison est au monde du délit, ce que l’art est aux mausolées, musées ou autres tombeaux pour œuvres achevées.

Mais la discothèque s’échappe progressivement des lieux dédiés et n’est plus aujourd’hui clairement définie par un milieu hermétique clos. En atteste la propagation de musiques et de vidéos sur des sites tels que YouTube. Cette discothèque mondiale improvisée déborde de partout, pour envahir supermarchés, aires d’autoroute, chemins de campagne, lieux désaffectés, places publiques, centres d’art… tous lieux qui n’ont pas pour vocation d’être dédiés à la fête.

Nous cherchons à réinventer la discothèque, à la libérer de la boîte dans laquelle elle s’est enfermée. Créer une fête dans laquelle différentes individualités se combinent, une manière d’harmoniser l'individuel et le collectif. Une discothèque adaptée à une société reposant sur l’agrégation d'individus plutôt que sur l’obligation du collectif.

Pendant la durée de l'exposition, la salle d'exposition de la Commanderie est transformée en discothèque sauvage. Dans la salle principale, une série de haut-parleurs diffusent chacun un son différents, lacunaires, jamais complets. Le public déplace lui-même les fragments musicaux. Une fois ré-assemblés, à la manière d’un puzzle sonore, ils forment la musique de la discothèque sauvage.

Une deuxième salle, à l’étage, est saturée de traces de danses sauvages du monde entier mises en réseau: rituels festifs entre amis, free parties, fêtes traditionnelles, danses improvisées dans une chambre d’adolescent, vidéo clips… Différentes musiques et danses se recoupent, se donnent la réplique, formant un chorus généralisé.

Comme le home cinema, la discothèque s'échappe des lieux dédiés et se fabrique chez soi, dans sa maison, dans sa chambre, dans sa cave, dans son salon. On peut voir sur des sites tels que Youtube les traces de discothèque filmées par des dj amateurs montrant leurs installations, ou des vidéos promotionnelles pour du matériel.

Ces films sont ici détournés de leur contexte pour produire une discothèque célibataire, réduite à la somme de ses constituants, machine infernale, automatisée, fonctionnant seule.

Diffusion

Résurgences, performances et arts éphémères. Plateforme. Paris, 21 juin 2012.

Discothèque sauvage, La Commanderie, Lacommande. Exposition du 17 au 29 juin 2011.

Annexes

Générique

Remerciement : With Clarisse Anicet, Gael Darras, Guillaume Delamarche, Olivia Earle, Jérémy Lakhlef, Matthieu Ma and Vincent Meyer.