Utopia Factory Abraxas

Stéphane Degoutin, Gwenola Wagon

Texte et tirage photographique

2010

Abraxas est le nom d’un dieu gnostique créé par Basilide, un hérétique du IIe siècle. Les Basilidiens ne croyaient pas en un dieu de bonté, mais en une divinité démiurge, duelle. Selon Carl Jung, Abraxas est « la vie et la mort dans le même temps. Il engendre la vérité et le mensonge, le bien et le mal, la lumière et l’obscurité dans le même mot et dans la même action. »

Photo : Stéphane Degoutin

Thomas More, l’auteur de L’Utopie, utilisa le nom d’Abraxas pour désigner l’île de son invention. Il avait sans doute été inspiré par l'Éloge de la Folie d'Érasme, où Abraxas désigne la ville des fous. Ce n’est que dans la version définitive du texte que Thomas More inventera, pour désigner son île, le mot d’« utopie ».

« Les Espaces d’Abraxas » est également le nom d’un grand ensemble de logements sociaux construit par Ricardo Bofill à Noisy-le-Grand. C’est un grand bâtiment sombre, indescriptible : summum du postmodernisme délirant, fait de colonnes grecques surdimensionnées, préfabriquées en béton, de perspectives vertigineuses et d’atriums en plein ciel au 17e étage, il a servi de décor au film Brazil de Terry Gilliam.

Il est pour le moins singulier d’avoir donné ce nom à un grand ensemble de HLM. Le quartier a d’ailleurs une image plutôt négative. Mais cela peut changer si l’on tire parti de sa bizarrerie. Sa vocation idéale n’était pas de servir d’immeuble d’habitation. Nous proposons que les habitants qui le désirent soient relogés ailleurs, que ceux qui souhaitent rester y demeurent, et que les logements libres soient utilisés pour installer les locaux d’une Utopia Factory. Le bâtiment conviendra parfaitement pour ce nouvel usage, puisqu'il possède déjà l’introversion propre aux lieux utopiques.

Utopia Factory est un centre de recherche où différentes utopies seront expérimentées à échelle 1. N'importe qui peut proposer un projet. S'il est accepté, une campagne de promotion est lancée pour rechercher des postulants pour l'expérimenter. La démarche est empirique : les volontaires testent les utopies pendant une période de quelques mois. Dans le cas où cela ne fonctionnerait pas, ils peuvent faire l’expérience d’une autre ou revenir à leur vie d’avant.

Nous ne croyons pas qu’il soit possible de construire de toutes pièces une société idéale, ni même que sa réalisation conduirait l'humanité au bonheur. Par contre, nous pensons que la recherche d’une société meilleure peut y contribuer. Utopia Factory se propose donc de construire non pas l’Eldorado mais les chemins qui y conduisent. Les utopies testées ici sont périssables et non garanties. Elles ne visent pas la perfection, bien au contraire, mais la mise en mouvement de la société.

Utopia Factory Abraxas fonctionne en réseau avec d’autres Utopia Factories à travers le monde : Shangaï, Le Cap, Bronx, Tromsø…

Diffusion

Utopia Factory, Zoo Research Lab (sérigraphies), La fabrique du hasard, Synesthésie, Saint-Denis, 2016

CPIF (Centre photographique d'Île-de-France, Pontault-Combault). 30 mars 2010

Utopia Factory, aux Passerelles-Centre culturel de Pontault-Combault. Exposition du 26 juin au 16 septembre 2010

Exposition, Île potentielle / Sex Park, Synesthésie, Saint-Denis, du 18 juin au 17 juillet 2010

Exposition Nogo Voyages, Galerie Ars Longa, Paris, 6 mai - 12 juin 2009

Attractions périphériques. Hospitalités 2009. Samedi 17 octobre 2009

Générique

Tirage photographique 150 x 100 cm

Avec l'aide du Centre Photographique d'Île-de-France.