Ce livre se déroule, comme une peinture de paysage chinois que le regard parcourt lentement.
J’utilise cette forme car je décris un panorama. Celui-ci n’est pas fait de montagnes dans la brume ou de buissons balayés par le vent, mais de centres de traitement de données, d’entrepôts de livraison, de flux de réseaux sociaux…
J’explore l’hypothèse qu’Internet s’inscrit dans un mouvement général de réduction de la société à des composants de petite échelle, ce qui permet une fluidification de ses mécanismes. Une idée de chimiste – la décomposition en poudre de la matière, avant de procéder à sa recomposition – est également appliquée aux relations sociales, à la mémoire, à l’humain en général.
Tout comme la réduction en poudre de la matière permet d’accélérer les réactions chimiques, la réduction en poudre de la société permet une décomposition et une recomposition accélérée de la matière dont est fait l’humain. Elle permet de multiplier les réactions au sein de la société, les productions de l’humanité, la chimie sociale : combinatoire des passions (Charles Fourier), hyperfragmentation du travail (Mechanical Turk), décomposition du savoir (Paul Otlet), Internet des neurones (Michael Chorost), société par agrégation des affects (Facebook).
C’est ce que j’appelle la « société-nuage ».